Pourquoi un CD sur les R.D.MARMANDE, marque presque inconnue et confidentielle ?
click to enlarge

Simplement pour rendre hommage à Raymond Daffaure, l'un des plus grands maquettistes et aussi l'un des plus méconnus. C'est en tout cas, le seul à avoir réalisé pendant près de 20 ans, jour après jour, au moins une création quotidienne.

Mais replongez-vous dans le contexte de la fin des années 1950 et des années 1960. Qu'existait-il au 1/43ème à cette époque ? Des Dinky Toys, des Corgi, des Solido, quelques Mercury, des modèles industriels pour enfants en zamac avec parfois des vitres en plastique transparent et des intérieurs rudimentaires ; … et toujours les mêmes modèles, les Jaguar D, les Mercedes-Benz W154,
les Citroën DS, les Renault Dauphine…
A cette époque, les collectionneurs de "petites voitures" étaient rares et encore regardés comme
"des grands enfants attardés". Mais pour la première fois, un maquettiste s'intéressait à eux en leur proposant des voitures inédites, peu connues et surtout LE modèle qu'ils désiraient mettre dans leur vitrine (à ce moment-là, on disait plutôt sur l'étagère) : le RÊVE pour un passionné d'Automobile.
Je me souviens encore de la joie que j'ai ressentie en recevant mon premier paquet et en découvrant 4 modèles alors inconnus : la Bentley TT Le Mans 1950, la Nash-Healey coupé Le Mans 1951,
la Jowett Javelin berline des 24 Heures de Spa 1948 et l'Aéro Minor Le Mans 1950; qui d'autre aurait pu me fabriquer ces modèles à cette époque. (A noter que deux de ces voitures n'ont toujours pas été reproduites en 2004 !).

Raymond Daffaure débute sa production en 1958 après avoir été lauréat du Prix Humbrol.
Inlassablement, jour après jour, il va sculpter des modèles pendant 20 ans sans changer de technique. Son génie transforme un morceau de sapin coupé aux bonnes dimensions en modèle attrayant et plein de charme. Ses modèles sont produits sous le nom de CREATION R.D. MARMANDE (R. pour Raymond, D pour Daffaure et Marmande étant la ville où il habite,
dans le Sud-Ouest de la France).

Comment les R.D. Marmande étaient-elles choisies ?

Raymond Daffaure choisissait lui-même un certain nombre de modèles selon l'actualité sportive, l'histoire de l'automobile et les documents qu'il possédait. Dès lors, il éditait un catalogue sous forme de feuillets manuscrits, puis de feuilles photocopiées. Il axait sa production surtout sur les modèles du Mans, les voitures de Sport et les GT et les nouveautés marquantes des Grands Salons Automobiles.
A côté de sa production officielle répertoriée sur catalogue, vous pouviez lui demander de créer n'importe quel modèle désiré à partir d'une photo : il a ainsi réalisé pour moi et quelques amis plusieurs séries avec des modèles uniques : les Cadillac de la collection Sanders, les Rolls Royce,
les Hotchkiss, les DKW, les Lancia, les Alfa Romeo, les petites allemandes des années 1950… et bien d'autres.

Un matériau de fabrication original : le bois !

Une fois les proportions et les volumes des voitures étudiés, Raymond Daffaure commandait des blocs de sapin qu'il faisait couper aux dimensions souhaitées ; le sapin était le bois le plus facile à travailler : pas aussi dur que le chêne et le hêtre et moins mou et fragile que le balza ; de plus, c'était une matière première bon marché.
N'oubliez-pas que dans les années 1960 les résines polymères et le métal blanc n'existaient pas encore pour les maquettes : les premiers modèles montés pour collectionneurs en métal blanc sont les Marc Europa dont seuls 2 modèles ont vu le jour en 1964 (Ferrari GTO et Porsche 904), les premiers kits en métal blanc apparaissent en 1968 sous la marque du révérend Paddy Stanley,
deux ans avant les vrais début du kit avec l'Anglais John Day. Quant aux résines polymères,
elles apparaissent au début des années 1970 chez les diverses productions Manou françaises et chez les artisans italiens.

Comment sont réalisées les R.D.MARMANDE ? click to enlarge

Mais revenons aux Créations R.D.Marmande. Le bloc de bois coupé en parallélogramme de bonne dimension est alors sculpté au couteau, au burin, au ciseau à bois et à la lime pour créer les formes exactes de la carrosserie ; les intérieurs sont creusés et gravés dans la masse ainsi que les tableaux de bord ; les toits sous forme de copeau de bois sont mis en forme, adaptés puis collés.
La carrosserie de base est alors mastiquée, puis poncée au papier de verre très fin. L'étape suivante consiste à rajouter les baguettes latérales, les baguettes de capot, les entourages de radiateur,
les pare-chocs, les poignées de portes et autres ornementation sous forme de fils de fer mis en forme, adaptés puis collés sur la carrosserie. Celle-ci est à nouveau mastiquée et poncée au papier de verre et enduite d'un apprêt. Prochaine étape, la peinture : celle-ci est appliquée au pinceau ;
les modèles ont souvent deux couleurs pour être plus attractifs. Puis vient l'opération des vitres qui sont découpées dans du plastique transparent, mises en forme, adaptées puis collées.
Dernière opération, les finitions : les roues de provenance Norev sont collées dans leur logement ;
les baguettes, les entourages de vitres, les poignées de portes sont peintes en argent, les feux en rouge ou jaune, les dessins des portes, capot et coffre en noir. Avant d'être emballés, les modèles sont encore signés : un rectangle de papier blanc est collé sur le châssis avec le nom CREATION R.D.MARMANDE au tampon, la date au stylo rouge, le nom, le type et la date du modèle au stylo noir ainsi que la mention échelle 1/43 et le numéro de série du modèle.
Tous ces modèles ont été réalisés sans aucune aide de machine moderne : aucun tour à bois, aucune perceuse-fraiseuse pour bricoleur, aucune bombe de peinture ni pistolet. TOUT A ETE CREE DES PROPRES MAINS DE RAYMOND DAFFAURE.

Finitions et exactitudes des lignes : un reproche souvent formulé. click to enlarge

Vous l'aurez compris, le charme de cette collection réside dans l'unité de fabrication sur 20 ans de toute la production RD, dans l'intérêt de la reproduction de modèles inédits et méconnus et dans
le charme naïf et artisanal du fait main et du modèle unique.
Il ne faut pas actuellement rechercher l'exactitude des lignes, des dimensions et des détails ni
une finition " high-tech ". Il faut les replacer dans leur contexte des années 1960, lorsque les kits,
les modèles montés pour collectionneurs et les modèles " chinois " industriels n'existaient pas;
il faut aussi se souvenir que les documents photographiques étaient rares, les vues arrières et
les détails souvent absents et qu'il fallait les deviner et les inventer.
Au début des années 1960, les R.D. étaient vendues aux alentours de 12-15 fr.français et à la fin de
la production environ 30fr.français. Raymond Daffaure était obligé de produire un ou deux modèle par jour pour vivre de ses créations.
Chaque modèle a été sculpté à l'unité dans une unité de temps différente, sur 20 ans pour certaines voitures, ce qui explique quelques différences sur un même modèle. Le record revient à la Ferrari GTO 1962 qui aurait été reproduite à plus de 200 exemplaires ; les derniers modèles ayant même été sculptés de tête.

Combien existe-t-il de R.D.Marmande ? click to enlarge click to enlarge

Une question bien difficile à répondre. Ce que je peux affirmer, c'est qu'entre 1971 et 1977 j'étais son distributeur pour la Suisse et que je recevais environ 20-25 modèles par mois ; il travaillait aussi pour d'autres collectionneurs et pour le magasin du Mans " MANOU " (certains modèles étaient même signés R.D.MANOU). On peut donc déduire une production de 30-40 modèles par mois, ce qui correspond à une production annuelle de 300 à 450 modèles pour cette période. Si l'on calcule sur 20 ans, on arrive à une production totale de 6000 à 9000 pièces, toutes uniques, reproduites
l'une après l'autre.
En regardant les Bourses d'échanges, les Salons type Rétromobile et les ventes aux enchères,
ces modèles sont rares et le total des modèles subsistants ne doit pas être très élevé.

Raymond Daffaure a été atteint d'un accident vasculaire cérébral en 1978 qui lui a occasionné
une paralysie du membre supérieur et l'a malheureusement forcé à l'arrêt de ses créations.

J'espère à travers ce résumé succint avoir pu rendre hommage à Raymond Daffaure pour l'originalité, l'avant-gardisme et l'unicité de ses créations.

HISTORY

Why a CD on the R.D. Marmande models, an almost unknown brand?

Simply to pay tribute to Raymond Daffaure, one of the greatest-ever model-builders, but at the same time one of the least known and recognized. In any case, he is the only one who, during almost 20 years, day after day, managed to create models every single day.

Now go back in time to the late 1950’s and the 1960’s. What existed in 1:43rd in that day and age? The Dinky Toys, Corgi, Solido, some Mercury, industrial models for kids made from zamak with sometimes transparent plastic windows and very basic interiors; … and always the same models: the Jaguar D, Mercedes Benz W154, Citroën DS, Renault Dauphine…

In those days collectors of “little cars” were few and far between and were still seen as somewhat retarded big children. But for the first time a model-builder showed an interest in them by offering them cars that were previously unavailable, little known and above all THE models that they wanted to put into their display cabinets (in those days one used to call them “shelves”): a DREAM for anyone passionate about cars.

I can still recall the joy I felt when I received my first package and discovered 4 models until then unknown: the Bentley TT Le Mans 1950, the Nash-Healey coupé Le Mans 1951, the Jowett Javelin sedan of the 1948 Spa 24 hrs and the Aéro Minor Le Mans 1950! Who else could have made me those models at that time? (It is interesting to note that two of these cars still have not been modeled as late as 2004!).

Raymond Daffaure started his production in 1958 after winning the Humbrol prize. Tirelessly, day after day, he will sculpt models during 20 years without changing the technique used. His genius transforms a piece of deal cut to the correct dimensions into an attractive model full of charm. His models are produced under the name CREATION R.D. MARMANDE ( R for Raymond, D for Daffaure and Marmande for the town where he lives in the South-West of France). 

How were the R.D. Marmande models chosen?

Raymond Daffaure himself chose those models that were in the sports news, from automotive history and from documentation he possessed. Based on these he made a catalogue in the form of handwritten and, later on, photocopied pages. He focused his production mainly on Le Mans, sports and GT cars and the memorable new models from the big car shows.

Aside from the official production that was listed in the catalogue, you could ask him to create any model you wanted on basis of a photograph. In this way he has made, for me and some friends, several series of unique models: the Cadillacs of the Sanders collection, the Rolls-Royces, Hotchkiss, DKW, Lancia, Alfa Romeo, the little German cars of the 1950’s … and many others.

An original production material: wood!

Once the proportions and dimensions had been studied, Raymond Daffaure ordered blocks of deal which he had cut to the required size; deal being the type of wood that could be worked with most easily: not as hard as oak or beech, and not as soft and fragile as balsa; moreover it was a cheap raw material.
Don’t forget that in the 1960’s polymer resins and white metal did not exist yet for models: the first built-up white metal models for collectors are the Marc Europa of which only 2 have seen the light of day in 1964 (Ferrari GTO and Porsche 904), the first white metal kits appeared in 1968 under the brand of the revered Paddy Stanley, two years before the real debut of the kit with Englishman John Day. As far as polymer resins is concerned, these appeared first in the early 1970’s with the various French Manou products, and with the Italian craftsmen.

How were the R.D. Marmade models made?

Let us go back to the Créations R.D. Marmande. Once the wood block is cut into a parallelogram of the correct size and then sculpted with knife, chisel and file to create the exact form of the bodywork; the interiors are hollowed out and carved from a block as are the dashboards; the roofs are made from wood shavings that are formed, adapted and then glued.
The basic bodywork is then filled with putty where necessary, then sanded with very fine glass paper and coated with a primer. Next stage, painting: this is done using brushes; the models often have two colors to make them more attractive. Then come the windows which are cut from transparent plastic, formed, adapted and glued in place.

Final operation, finishing: the wheels coming from Norev are glued in their slots; the side-trim, the window frames, the door handles are painted in silver, the lights in red or yellow, the outlines of doors, hood and trunk in black. Before being packed, the models are signed: a rectangle of white paper is glued to the chassis with the name CREATION R.D. MARMANDE stamped on, the date written on with a red ball-point pen, the name, type and date of the model with a black ball-point pen as well as the mention of the scale 1/43 and the serial number of the model.

All these models have been produced without the use of any modern machines: no lathe, no drill or DIY milling machine, no spray can or spray gun. EVERYTHING WAS CREATED BY RAYMOND DAFFAURE’S OWN HANDS.

Finishing and accuracy of the lines: an often heard criticism

You will have understood, the charm of this collection lies in the unity of production over a period of 20 years of the total production of RD, in the interest of making unusual models never before produced and in the naïve charm of a handcrafted unique model.

One should not look for an exactness of the lines, the dimensions and the detail, nor for a “high-tech” finish. They should be placed back into the context of the 1960’s when kits, readymade collectors models and “chinese”  industrial models did not exist. It should also be remembered that photographic documentation was scarce, rear views and details often absent, and that these had to be guessed at and made up.

In the early 1960’s the R.D. models were sold for around French Francs 12.00 to 15.00 and at the end of the production for around FRF 30.00
Raymond Daffaure was forced to make one or two models a day in order to be able to live from his creations.
Each model was sculpted as a single unit over a differing period of time, over 20 years for some cars, which explains the differences found on the same model. The record here is held by the Ferrari GTO 1962 of which over 200 copies have been made, the last ones even sculpted from memory.

How many R.D. Marmande models exist?
A question that is difficult to answer. What I can assert is that between 1971 and 1977 I was his distributor for Switzerland and that I received about 20 to 25 models a month; he also worked for other collectors and for the shop “MANOU” situated in the town of Le Mans (some models were even signed R.D. MANOU).
On that basis we can assume a production of 30 to 40 models per month, which comes to a yearly production of 300 to 450 models for this period. If calculated over 20 years we arrive at a total of between 6000 and 9000 models, all unique, produced one after the other.
Looking at swapmeets, shows like Retromobile and auctions, the models are scarce and the number of models still surviving cannot be very high.

In 1978 Raymond Daffaure suffered a stroke (CVA) which paralyzed an upper limb and this unfortunately put a stop to his creating any new models.

I hope that, through this brief summary, I have been able to pay tribute to Raymond Daffaure for his originality, his avant-gardism and the uniqueness of his creations.